André SUARES - TB lettre !
André Suarès (1868-1948), poète et écrivain.
L.A.S. Paris 23/12/1938, aux encres rouge et bleu, signée de son monograme à 3 traits horizontaux, adressée à Louis Brun* (enveloppe autographe jointe avec ses nom et adresse de sa main au verso, timbre découpé). Il vient de renter à Paris, « j’ai quitté la Provence et le mas d’Abeille par dix degrés à l’ombre, pour tomber par quinze degrés de froids dans l’Ile St-Louis… » Puis, évoquant les prédictions de 1936 qu’il exposait dans son ouvrage Vues sur l’Europe : « Tout ce que nous voyons n’est-ce pas la justification éclatante des Vues sur l’Europe ? Voulez-vous publier notre livre à présent ? Certes, précédé d’une préface, où j’en ferai l’histoire (…) En mars 1936, j’ai été au-devant : je saurai où retirer cette fois encore pour ne pas vous nuire… » 1p ½ in-4, tampon léger de la collection Debauve au verso.
*Louis Brun, bras droit de l’éditeur Bernard Grasset, fut assassiné dans les premiers mois de l’occupation par son épouse que ses infidélités avaient rendue folle.
Note : “ Attention ! Ce livre peut être dangereux… ” Cet avertissement fut lancé par André Suarès, le 7 mars 1936, à l’intention de Bernard Grasset, au moment précis où l’on mettait sous presse Vues sur l’Europe. Quelques centaines d’exemplaires de l’ouvrage étaient déja imprimées quand Hitler fit franchir le Rhin à la Wehrmacht. Bernard Grasset et Louis Brun, directeur des Éditions Grasset, crurent nécessaire d’user de leur influence auprès de l’écrivain pour différer une publication qui, selon eux, risquait de troubler l’ordre public et de ruiner sans recours les relations franco-allemandes et franco-italiennes. Le tirage fut interrompu, les volumes tirés mis au pilon. Vues sur l’Europe devint une affaire classée. Fin décembre 1938, Louis Brun estima que le moment était venu de sortir enfin de l’ombre Vues sur l’Europe. Outre une préface, André Suarès voulut ajouter une postface à son ouvrage. Mais quand Bernard Grasset et Louis Brun eurent pris connaissance de cette postface, qui contenait des pages incendiaires dirigées autant contre Hitler, Mussolini et Staline que contre les gouvernants français, tout fut une nouvelle fois remis en question…